CARITAS IN VERITATE (II) nouvelle encyclique papale pour la doctrine sociale de l'église

Publié le par Le P'tit Démocrate de Chambéry

Suite des larges extraits que nous vous proposons de cette encyclique qui fait plus de 150 pages et qui nécessiterait de longues journées de réflexion pour en débattre...temps que nous n'avons pas sur ce blog.

Aussi dans la continuité d'une tradition Juive et Chrétienne (protestante), nous portons à votre connaissance ces extraits de texte afin de vous  faciliter le sentier et d'une heuristique mais surtout d'une herméneutique personnelle, voir même soyons fou..qui vous invite à lire le texte dans son intégralité.

Rappelons pour être à la hauteur de notre esprit critique  que, dans Feu la chrétienté Emmanuel Mounier se méfiait de doctrine sociale de l’église dans le sens où cela lui rappelait l’emprise chrétienne sur les mentalités et les institutions.

E. Mounier, dans cette ouvrage, définissait les chrétiens de son espèce par un double exclusion : "Ils n'entendent pas compromettre dans les engagements politiques des valeurs qui sont par nature transcendantes au politique. Ils n'entendent pas non plus réduire d'un cœur léger le problème du christianisme et de l'Eglise dans le monde au seul danger clérical et remettre au trente-sixième siècle le souci de confronter le christianisme et la révolution.



CARITAS IN VERITATE 

 

CHAPITRE  II    LE  DÉVELOPPEMENT  HUMAIN AUJOURD’ HUI


     27.......Il est donc nécessaire que se forme une conscience solidaire qui considère l’alimentation et l’accès à l’eau comme droits universels de tous les êtres humains, sans distinction ni discrimination. 

28. Un des aspects les plus évidents du développement contemporain est l’importance du thème du respect de la vie, qui ne peut en aucun cas être disjoint des questions relatives au développement des peuples.
L
’ouverture à la vie est au centre du vrai développement. Quand une société s’oriente vers le refus et la suppression de la vie, elle finit par ne plus trouver les motivations et les énergies nécessaires pour œuvrer au service du vrai bien de l’homme.   Il n’y a pas l’intelligence puis l’amour: il y a l’amour riche d’intelligence et l’intelligence pleine d’amour.

31. Cela signifie que les évaluations morales et la recherche scientifique doivent croître ensemble et que la charité doit les animer en un ensemble interdisciplinaire harmonieux, fait d’unité et de distinction.

32. Les grandes nouveautés, que le domaine du développement des peuples présente aujourd’hui, appellent en de nombreux cas des solutions neuves: 

-La dignité de la personne et les exigences de la justice demandent, aujourd’hui surtout, que les choix économiques ne fassent pas augmenter de façon excessive et moralement inacceptable les écarts de richesse  et que l’on continue à se donner comme objectif prioritaire l’accès au travail ou son maintien, pour tous. 

-Il convient également de rappeler que la réduction des cultures à la dimension technologique, si elle peut favoriser à court terme la réalisation de profits, constitue un obstacle à long terme à l’enrichissement réciproque et aux dynamiques de collaboration. 

-L’abaissement du niveau de protection des droits des travailleurs et l’abandon des mécanismes de redistribution des revenus pour donner au pays une plus grande compétitivité internationale gênent la consolidation d’un développement à long terme.

-Cela demande
une réflexion nouvelle et approfondie sur le sens de l’économie et de ses fins, ainsi qu’une révision profonde et clairvoyante du modèle de développement pour en corriger les dysfonctionnements et les déséquilibres. C’est ce qu’exige, en outre, l’état de santé écologique de la planète et surtout ce qu’appelle la crise culturelle et morale de l’homme, dont les symptômes sont depuis longtemps évidents partout dans le monde.

33. .... 
le progrès, demeure un problème en suspens,rendu plus aigu et urgent en raison de la crise économique et financière actuelle.  


CHAPITRE  III FRATERNITÉ,  DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE  ET  SOCIÉTÉ  CIVILE


34. L’amour dans la vérité place l’homme devant l’étonnante expérience du don. La gratuité est présente dans sa vie sous de multiples formes qui souvent ne sont pas reconnues en raison d’une vision de l’existence purement productiviste et utilitariste. 


36 à 42 Consacré au Marché et à l'entreprise : 

35. Lorsqu’il est fondé sur une confiance réciproque et générale, le marché est l’institution économique qui permet aux personnes de se rencontrer, en tant qu’agents économiques, utilisant le contrat pour régler leurs relations et échangeant des biens et des services fongibles entre eux pour satisfaire leurs besoins et leurs désirs. Le marché est soumis aux principes de la justice dite commutative, qui règle justement les rapports du donner et du recevoir entre sujets égaux.

Mais la doctrine sociale de l’Église n’a jamais cessé de mettre en évidence l’importance de la justice distributive et de la justice sociale pour l’économie de marché elle-même, non seulement parce qu’elle est insérée dans les maillons d’un contexte social et politique plus vaste, mais aussi à cause de la trame des relations dans lesquelles elle se réalise. En effet, abandonné au seul principe de l’équivalence de valeur des biens échangés, le marché n’arrive pas à produire la cohésion sociale dont il a pourtant besoin pour bien fonctionner.

Sans formes internes de solidarité et de confiance réciproque, le marché ne peut pleinement remplir sa fonction économique
. Aujourd’hui, c’est cette confiance qui fait défaut, et la perte de confiance est une perte grave. 

36. L’activité économique ne peut résoudre tous les problèmes sociaux par la simple extension de la logique marchande. Celle-là doit viser la recherche du bien commun, que la communauté politique d’abord doit aussi prendre en charge. 

.....les principes traditionnels de l’éthique sociale, tels que la transparence, l’honnêteté et la responsabilité ne peuvent être négligées ou sous-évaluées, mais aussi que dans les relations marchandes le principe de gratuité et la logique du don, comme expression de la fraternité, peuvent et doivent trouver leur place à l’intérieur de l’activité économique normale. C’est une exigence de l’homme de ce temps, mais aussi une exigence de la raison économique elle-même. C’est une exigence conjointe de la charité et de la vérité.

37. La doctrine sociale de l’Église a toujours soutenu que la justice se rapporte à toutes les phases de l’activité économique, .....

Ainsi toute décision économique a-t-elle une conséquence de caractère moral.

Il est nécessaire aussi que, sur le marché, soient ouverts des espaces aux activités économiques réalisées par des sujets qui choisissent librement de conformer leur propre agir à des principes différents de ceux du seul profit, sans pour cela renoncer à produire de la valeur économique. Les nombreux types d’économie qui tirent leur origine d’initiatives religieuses et laïques, démontrent que cela est concrètement possible.

 40. Les dynamiques économiques internationales actuelles, caractérisées par de graves déviances et des dysfonctionnements, appellent également de profonds changements dans la façon de concevoir l’entreprise.

 ....la gestion de l’entreprise ne peut pas tenir compte des intérêts de ses seuls propriétaires, mais aussi de ceux de toutes les autres catégories de sujets qui contribuent à la vie de l’entreprise: les travailleurs, les clients, les fournisseurs des divers éléments de la production, les communautés humaines qui en dépendent.  

41...... il est utile d’observer que l’
entreprenariat a et doit toujours plus avoir une signification plurivalente. La prééminence persistante du binôme marché-État nous a habitués à penser exclusivement à l’entrepreneur privé de type capitaliste, d’une part, et au haut-fonctionnaire de l’autre. En réalité, l’entreprenariat doit être compris de façon diversifiée. Ceci découle d’une série de raisons méta-économiques. Avant d’avoir une signification professionnelle, l’entreprenariat a une signification humaine. Il est inscrit dans tout travail, vu comme « actus personæ , c’est pourquoi il est bon qu’à tout travailleur soit offerte la possibilité d’apporter sa contribution propre de sorte que lui-même « sache travailler ‘à son compte’ .  

Ce n’est pas sans raison que Paul VI enseignait que « tout travailleur est un créateur .

CHAPITRE  IV  DÉVELOPPEMENT  DES  PEUPLES,  DROITS  ET  DEVOIRS,  ENVIRONNEMENT

43... Avoir en commun des devoirs réciproques mobilise beaucoup plus que la seule revendication de droits.

46. Considérant les thématiques relatives au rapport entre entreprise et éthique, ainsi que l’évolution que le système de production connaît actuellement, il semble que la distinction faite jusqu’ici entre entreprises à but lucratif (profit) et organisations à but non lucratif (non profit) ne soit plus en mesure de rendre pleinement compte de la réalité, ni d’orienter efficacement l’avenir. Au cours de ces dernières décennies, une ample sphère intermédiaire entre ces deux types d’entreprises a surgi. Elle est constituée d’entreprises traditionnelles, – qui cependant souscrivent des pactes d’aide aux pays sous-développés –, de fondations qui sont l’expression d’entreprises individuelles, de groupes d’entreprises ayant des buts d’utilité sociale, du monde varié des acteurs de l’économie dite « ivile et de communion . Il ne s’agit pas seulement d’un « troisième secteur , mais d’une nouvelle réalité vaste et complexe, qui touche le privé et le public et qui n’exclut pas le profit mais le considère comme un instrument pour réaliser des objectifs humains et sociaux. 

la pluralité même des formes institutionnelles de l’entreprise crée un marché plus civique et en même temps plus compétitif.

Dans les interventions en faveur du développement, le principe de la centralité de la personne humaine doit être préservé car elle est le sujet qui, le premier, doit prendre en charge la tâche du développement. 

de 48 à 52  Sur l'environnement
 Le thème du développement est aussi aujourd’hui fortement lié aux devoirs qu’engendre le rapport de l’homme avec l’environnement naturel.  

La façon dont l’homme traite l’environnement influence les modalités avec lesquelles il se traite lui-même et réciproquement.

CHAPITRE  V   LA  COLLABORATION DE  LA  FAMILLE  HUMAINE

54. Le thème du développement coïncide avec celui de l’inclusion relationnelle de toutes les personnes et de tous les peuples dans l’unique communauté de la famille humaine qui se construit dans la solidarité sur la base des valeurs fondamentales de la justice et de la paix. 
59. La coopération au développement ne doit pas prendre en considération la seule dimension économique; elle doit devenir une grande occasion de rencontre culturelle et humaine.  

Sur les Flux migratoires
62-Nous sommes tous témoins du poids de souffrances, de malaise et d’aspirations qui accompagne les flux migratoires. La gestion de ce phénomène est complexe, nous le savons tous; il s’avère toutefois que les travailleurs étrangers, malgré les difficultés liées à leur intégration, apportent par leur travail, une contribution appréciable au développement économique du pays qui les accueille, mais aussi à leur pays d’origine par leurs envois d’argent. Il est évident que ces travailleurs ne doivent pas être considérés comme une marchandise ou simplement comme une force de travail. Ils ne doivent donc pas être traités comme n’importe quel autre facteur de production. Tout migrant est une personne humaine qui, en tant que telle, possède des droits fondamentaux inaliénables qui doivent être respectés par tous et en toute circonstance. 

63. En considérant les problèmes du développement, on ne peut omettre de souligner le lien étroit existant entre pauvreté et chômage. Dans de nombreux cas, la pauvreté est le résultat de la violation de la dignité du travail humain, soit parce que les possibilités de travail sont limitées (chômage ou sous-emploi), soit parce qu’on mésestime « es droits qui en proviennent, spécialement le droit au juste salaire, à la sécurité de la personne du travailleur et de sa famille .  

Que veut dire le mot " décent"  lorsqu’il est appliqué au travail?

-Il signifie un travail qui, dans chaque société, soit l’expression de la dignité essentielle de tout homme et de toute femme:
-un travail choisi librement, qui associe efficacement les travailleurs, hommes et femmes, au développement de leur communauté; un travail qui, de cette manière, permette aux travailleurs d’être respectés sans aucune discrimination;
-un travail qui donne les moyens de pourvoir aux nécessités de la famille et de scolariser les enfants, sans que ceux-ci ne soient eux-mêmes obligés de travailler;
-un travail qui permette aux travailleurs de s’organiser librement et de faire entendre leur voix;
-un travail qui laisse un temps suffisant pour retrouver ses propres racines au niveau personnel, familial et spirituel;
-un travail qui assure aux travailleurs parvenus à l’âge de la retraite des conditions de vie dignes.


66. L’interconnexion mondiale a fait surgir un nouveau pouvoir politique, celui des consommateurs et de leurs associations. C’est un phénomène sur lequel il faut approfondir la réflexion: il comporte des éléments positifs qu’il convient d’encourager et aussi des excès à éviter. Il est bon que les personnes se rendent compte qu’acheter est non seulement un acte économique mais toujours aussi un acte moral. Le consommateur a donc une responsabilité sociale

Pour un gouvernement mondial
67.
Face au développement irrésistible de l’interdépendance mondiale, et alors que nous sommes en présence d’une récession également mondiale, l’urgence de la réforme de l’Organisation des Nations Unies comme celle de l’architecture économique et financière internationale en vue de donner une réalité concrète au concept de famille des Nations, trouve un large écho.

Pour le gouvernement de l’économie mondiale, pour assainir les économies frappées par la crise, pour prévenir son aggravation et de plus grands déséquilibres, pour procéder à un souhaitable désarmement intégral, pour arriver à la sécurité alimentaire et à la paix, pour assurer la protection de l’environnement et pour réguler les flux migratoires, il est urgent que soit mise en place une véritable

Autorité politique mondiale
telle qu’elle a déjà été esquissée par mon Prédécesseur, le bienheureux Jean XXIII. Une telle Autorité devra être réglée par le droit, se conformer de manière cohérente aux principes de subsidiarité et de solidarité, être ordonnée à la réalisation du bien commun, s’engager pour la promotion d’un authentique développement humain intégral qui s’inspire des valeurs de l’amour et de la vérité.

Cette Autorité devra
en outre être reconnue par tous, jouir d’un pouvoir effectif pour assurer à chacun la sécurité, le respect de la justice et des droits . Elle devra évidemment posséder la faculté de faire respecter ses décisions par les différentes parties, ainsi que les mesures coordonnées adoptées par les divers forums internationaux. En l’absence de ces conditions, le droit international, malgré les grands progrès accomplis dans divers domaines, risquerait en fait d’être conditionné par les équilibres de pouvoir entre les plus puissants. Le développement intégral des peuples et la collaboration internationale exigent que
soit institué un degré supérieur d’organisation à l’échelle internationale de type subsidiaire pour la gouvernance de la mondialisation et que soit finalement mis en place un ordre social conforme à l’ordre moral et au lien entre les sphères morale et sociale, entre le politique et la sphère économique et civile que prévoyait déjà le Statut des Nations Unies.


CHAPITRE  VI   LE  DÉVELOPPEMENT  DES  PEUPLES  ET  LA  TECHNIQUE

68-Personne ne modèle arbitrairement sa conscience, mais tous construisent leur propre « moi  sur la base d’un « moi  qui nous a été donné. Non seulement nous ne pouvons pas disposer des autres, mais nous ne pouvons pas davantage disposer de nous-mêmes. Le développement de la personne s’étiole, si elle prétend en être l’unique auteur.

Le processus de mondialisation pourrait substituer la technologie aux idéologies, devenue à son tour un pouvoir idéologique qui expose l’humanité au risque de se trouver enfermée dans un a priori d’où elle ne pourrait sortir pour rencontrer l’être et la vérité.
Cette vision donne aujourd’hui à la mentalité techniciste tant de force qu’elle fait coïncider le vrai avec le faisable. 

La clef du développement, c’est une intelligence capable de penser la technique et de saisir le sens pleinement humain du “faire” de l’homme, sur l’horizon de sens de la personne prise dans la globalité de son être.

 Mais la liberté humaine n’est vraiment elle-même que lorsqu’elle répond à la fascination de la technique par des décisions qui sont le fruit de la responsabilité morale.

Sur les NTIC

73. Au développement technologique est liée la diffusion croissante des moyens de communication sociale. Il est désormais presque impossible d’imaginer que la famille humaine puisse exister sans eux. Pour le bien et pour le mal, ils sont insérés à ce point dans la vie du monde, qu’il semble vraiment absurde, comme certains le font, de prétendre qu’ils seraient neutres, et de revendiquer leur autonomie à l’égard de la morale relative aux personnes. 

 Conformément à ce que requiert une gestion correcte de la mondialisation et du développement, le sens et la finalité des médias doivent être recherchés sur une base anthropologique. Cela signifie qu’ils peuvent être une occasion d’humanisation non seulement quand, grâce au développement technologique, ils offrent de plus grandes possibilités de communication et d’information, mais surtout quand ils sont structurés et orientés à la lumière d’une image de la personne et du bien commun qui en respecte les valeurs universelles 

75. Paul VI avait déjà reconnu et mis en évidence l’horizon mondial de la question sociale. En le suivant sur ce chemin, il faut affirmer aujourd’hui que la question sociale est devenue radicalement une question anthropologique, au sens où elle implique la manière même, non seulement de concevoir, mais aussi de manipuler la vie, remise toujours plus entre les mains de l’homme par les biotechnologies

Le problème du développement est strictement lié aussi à notre conception de l’âme humaine, dès lors que notre moi est souvent réduit à la psyché et que la santé de l’âme se confond avec le bien-être émotionnel. Ces réductions se fondent sur une profonde incompréhension de la vie spirituelle et elles conduisent à méconnaître que le développement de l’homme et des peuples dépend en fait aussi de la résolution de problèmes de nature spirituelle. Le développement doit comprendre une croissance spirituelle, et pas seulement matérielle, parce que la personne humaine est une « nité d’âme et de corps , née de l’amour créateur de Dieu et destinée à vivre éternellement


CONCLUSION
Dans cette dernière partie, l'encyclique affiche les “ couleurs de la boutique“

L’homme n’est pas à même de gérer à lui seul son progrès, parce qu’il ne peut fonder par lui-même un véritable humanisme.  
L’humanisme qui exclut Dieu est un humanisme inhumain



Vous avez tout  l'été pour  méditer et réfléchir..il n'y aura pas de controles
 

 
 

Publié dans Religions

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F
-"un travail qui laisse un temps suffisant pour retrouver ses propres racines au niveau personnel, familial et spirituel" <br /> la banalisation du travail le dimanche ne devrait pas faciliter la chose !!
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